Après l’adoption cet été du paquet législatif pouvoir d’achat, incluant la mise en place de la prime du partage de la valeur, le gouvernement veut “aller plus loin” et demande aux partenaires sociaux d’ouvrir une négociation nationale interprofessionnelle dont le résultat pourrait être repris dans le budget 2023.

Poursuivre la réflexion à l’échelle interprofessionnelle. Un mois après l’adoption de la loi relative à la protection du pouvoir d’achat, Olivier Dussopt invite syndicats et patronat à promouvoir davantage les mécanismes de participation et d’intéressement dans l’entreprise. Dans un document d’orientation formel transmis le 16 septembre dernier, le ministre du Travail demande aux partenaires sociaux d’« engager une négociation nationale interprofessionnelle sur le partage de la valeur », dont les résultats pourront se traduire dans le cadre du projet de loi de finances ou « de tout autre projet de loi ». Ces dernières années, plusieurs réformes ont été menées pour faciliter la mise en œuvre de l’intéressement et développer les dispositifs de partage de la valeur. Le gouvernement, dans le sillage de sa loi pouvoir d’achat, veut aujourd’hui « aller plus loin » dans la généralisation des dispositifs, avec « une attention particulière portées aux entreprises de moins de 50 salariés. »

Calendrier contraint

Mais pour approfondir ces questions, les partenaires sociaux – s’ils décident de s’engager – vont devoir aller vite. « Un retour des partenaires sociaux serait souhaitable d’ici le 1er novembre », écrit le ministre du Travail, qui demande aux organisations syndicales et patronales de faire connaître d’ici au 2 octobre leur position sur l’ouverture d’une telle négociation. Pour l’heure, la CFDT n’y est pas opposée, elle qui, encore récemment, regrettait que la loi sur le pouvoir d’achat n’intègre pas suffisamment le partage des richesses dans l’entreprise. « Nous demandons la généralisation de la participation à tous les travailleurs et dans toutes les entreprises. Nous voulons aboutir sur ce sujet par le dialogue social, mais si les employeurs refusent, nous demanderons au gouvernement de prendre ses responsabilités », affirmait, début septembre, Laurent Berger dans un entretien à Syndicalisme Hebdo.

Trois objectifs affichés

Poursuivre la réflexion sur l’intéressement et la participation sous forme d’une discussion interprofessionnelle est donc, en soi, une réponse aux attentes cédétistes. Mais une réponse partielle. Trois axes de discussion ont été dressés par l’exécutif : généraliser le bénéfice des dispositifs de partage de la valeur à tous les salariés ; simplifier et articuler les mécanismes existants ; orienter l’épargne salariale vers l’investissement socialement responsable ou la transition écologique. « Une approche du partage de la valeur relativement restrictive, note le service Économie et Société de la Confédération, qui ne fait pas mention du partage du pouvoir dans l’entreprise entre les actionnaires, qui apportent le capital, et les salariés, qui apportent le travail et leurs compétences. » De la même manière, « on ne retrouve rien sur la transparence fiscale [indispensable pour une juste répartition de la valeur] ni sur le partage équitable de la valeur tout au long de la chaîne de valeur ».

Sans oublier que le sujet a déjà été sur la table. À l’automne 2020, une concertation devait s’ouvrir sur le partage de la valeur, sur la base d’un diagnostic partagé réalisé en mars 2019. Mais la première rencontre, repoussée à la demande du Medef, ne verra finalement jamais le jour. Pas sûr que, cette fois encore, le patronat soit enclin à vouloir avancer sur la généralisation des dispositifs à toutes les entreprises. Le Medef, par la voix de son président, Geoffroy Roux de Bézieux, a déjà prévenu qu’il n’était « pas envisageable de rendre la participation obligatoire dans les entreprises de moins de 50 salariés ».

 

Anne-Sophie Balle
Rédactrice en chef adjointe de Syndicalisme Hebdo