Chaque année, les jours fériés amènent avec eux leur lot d’interrogations. Sommes-nous payés un jour férié ? L’employeur peut-il imposer de travailler un jour férié ? Quel est le régime d’un jour chômé ?
L’occasion pour nous de faire un tour d’horizon des problématiques les plus souvent rencontrées, pour profiter des beaux jours en toute quiétude juridique !
COMBIEN Y A-T-IL DE JOURS FÉRIÉS LÉGAUX ?
Le Code du travail liste 11 jours fériés légaux dans l’année, auxquels s’ajoutent des jours supplémentaires en fonction du métier (certaines conventions collectives comme le bâtiment, les mineurs) ou selon la région où le salarié travaille (le Vendredi Saint, dans les communes ayant un temple protestant ou une église mixte et le 26 décembre sont fériés en Alsace et en Moselle).
Les fêtes légales au niveau national sont les suivantes :
– 1er janvier
– Lundi de Pâques
– 1er Mai
– 8 Mai
– Jeudi de l’Ascension
– Lundi de Pentecôte
– 14 juillet
– 15 août
– 1er Novembre
– 11 Novembre
– 25 Décembre
L’EMPLOYEUR PEUT-IL IMPOSER AU SALARIÉ DE TRAVAILLER UN JOUR FÉRIÉ ?
Tout d’abord, il est important d’avoir à l’esprit que les jours fériés ne correspondent pas forcément à des journées non travaillées mais payées !
En réalité, aux termes du Code du travail, seul le 1er Mai est un jour obligatoirement chômé – sauf pour certains établissements.
Néanmoins, il arrive souvent que les conventions ou accords collectifs prévoient des dispositions spécifiques sur ce point. Pour savoir si le jour férié doit être chômé ou travaillé, le salarié doit donc vérifier ce que prévoit l’accord collectif applicable dans l’entreprise. L’article L.3133-3-1 du Code du travail énonce que les jours fériés sont fixés par accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.
En matière de temps de travail, c’est l’accord d’entreprise qui prime sur l’accord de branche. Autrement dit, si l’accord d’entreprise prévoit des dispositions en matière de jours fériés et que l’accord de branche en prévoit également, c’est l’accord d’entreprise qui s’applique et non l’accord de branche. La branche ne reprendra sa place qu’à défaut d’accord d’entreprise/d’établissement.
En l’absence de dispositions spécifiques d’un accord collectif, c’est à l’employeur de fixer les jours fériés chômés. Il peut donc à ce titre imposer aux salariés de travailler les jours fériés.
Le refus, pour le salarié, de travailler un jour férié constitue une absence injustifiée permettant à l’employeur de retenir les heures non travaillées sur le salaire mensuel (1) et, le cas échéant, de le sanctionner.
Toutefois, le salarié qui refuse de travailler un jour férié défini comme devant être chômé ne peut être sanctionné (2).
POURQUOI LE 1ER MAI EST-IL UN CAS À PART ?
Selon l’article L. 3133-4 du Code du travail, le 1er Mai est le seul jour férié légal obligatoirement chômé. Autrement dit, ce jour est obligatoirement payé et non travaillé.
L’article L. 3133-6 du Code du travail ajoute qu’il est possible de faire travailler les salariés ce jour-là dans les établissements et services qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail. On pense notamment aux hôpitaux, aux hôtels ou encore aux transports…
Il est à relever que l’employeur encourt une amende de 4e classe (= 750 €), appliquée autant de fois qu’il y a de salariés concernés lorsqu’il fait travailler des salariés le 1er Mai sans que son activité le justifie (3).
S’agissant des salariés ayant moins de 18 ans, le principe est le suivant : il est interdit de faire travailler les salariés et les apprentis de moins de 18 ans les jours de fêtes reconnus par la loi. En cas de non-respect de cette interdiction, l’employeur s’expose à une amende (4).
Il en va autrement dans les 13 secteurs listés au sein de l’article R. 3164-2 du Code du travail.
LES JOURS FÉRIÉS CHÔMÉS PEUVENT-ILS ÊTRE RÉCUPÉRÉS ?
La réponse est non et le principe est d’ordre public ! D’après l’article L 3133-2 du Code du travail, les heures de travail perdues en raison de chômage des jours fériés ne donnent pas lieu à récupération.
LES JOURS FÉRIÉS TRAVAILLÉS SONT-ILS PAYÉS DOUBLE ?
Pas forcément ! Les jours fériés n’étant pas obligatoirement chômés, ils ne donnent droit, lorsqu’ils sont travaillés, qu’au paiement du salaire normal, sauf dispositions conventionnelles plus favorables.
Seules les heures travaillées le 1er Mai sont obligatoirement payées double.
Les salariés travaillant de nuit en partie le 1er Mai et le lendemain (ou la veille) bénéficient également du doublement du salaire.
LES JOURS FÉRIÉS CHÔMÉS SONT-ILS RÉMUNÉRÉS ?
Si le jour férié chômé tombe un jour où le salarié aurait dû normalement travailler, les conséquences divergent.
– Pour le 1er Mai, le salaire est maintenu, quelle que soit l’ancienneté du salarié : cette journée ne peut entraîner de perte de salaire. Ainsi, les salariés rémunérés à l’heure, à la journée ou au rendement ont droit à une indemnité égale au salaire perdu du fait de ce chômage. Les heures supplémentaires habituellement effectuées doivent être payées avec majoration de salaire.
– Pour les autres jours fériés, cela n’a aucune incidence sur la rémunération tant que le salarié a au moins 3 mois d’ancienneté dans l’entreprise. Cette règle s’applique également aux salariés saisonniers si, du fait de divers contrats successifs ou non, ils cumulent une ancienneté totale d’au moins 3 mois dans l’entreprise.
En revanche, les salariés travaillant à domicile et les salariés intermittents ne sont pas rémunérés, sauf si un accord collectif ou un usage le prévoit. Les travailleurs temporaires ont droit au paiement des jours fériés, indépendamment de leur ancienneté si les salariés de l’entreprise utilisatrice en bénéficient.
Si le jour férié chômé tombe un jour de repos habituel dans l’entreprise (ex : le dimanche), cela n’aura pas d’incidence sur le salaire et n’ouvrira pas droit à un repos complémentaire.
Certaines conventions ou accords collectifs peuvent prévoir des dispositions plus favorables.
QUID DES JOURS FÉRIÉS QUI TOMBENT DURANT LES CONGÉS PAYÉS ?
Si le jour férié est travaillé dans l’entreprise, il est considéré comme un jour ouvrable et sera donc décompté des congés payés.
En revanche, s’il s’agit d’un jour férié qui est chômé dans l’entreprise, il ne sera pas considéré comme un jour ouvrable et ne sera pas décompté des congés (et ce, même s’il tombe un jour de la semaine où les salariés ne travaillent pas normalement en raison de la répartition des horaires).
Il en est de même lorsque le jour férié chômé coïncide avec un jour habituellement non travaillé dans l’entreprise du fait de la répartition de l’horaire (c’est par exemple le cas du samedi). La chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que cela avait pour conséquence de prolonger le congé d’une journée (ou bien il sera décompté un jour de congé de moins).
QUID DES JOURS FÉRIÉS DURANT UN CONGÉ MALADIE OU MATERNITÉ ?
Il n’y a un aucun impact sur la rémunération du salarié lorsque le jour férié coïncide avec un congé maladie ou congé maternité. Il est à relever également que le jour férié ne reporte pas pour autant le terme (= la fin) du congé.
QUID DES JOURS FÉRIÉS DURANT UNE PÉRIODE DE GRÈVE ?
Si la période de grève tombe sur un jour férié chômé et payé pour les salariés qui continuent l’exécution de leur contrat de travail, les salariés grévistes ne peuvent, selon la Cour de cassation, prétendre au paiement de ce jour (5).
QU’EST-CE QU’UN PONT ?
Selon l’article L 3121-50 3 ° du Code du travail, constitue un jour de pont le chômage d’1 ou 2 jours ouvrables compris entre un jour férié et un jour de repos hebdomadaire ou un autre jour chômé de la semaine, ou d’un jour précédant les congés annuels. La chambre sociale de la Cour de cassation a considéré que le chômage accordé sur une journée ne répondant pas à cette définition ne pourra pas être qualifié de pont ni donner lieu à récupération (6).
L’EMPLOYEUR EST-IL TENU D’ACCORDER DES PONTS ?
Sauf disposition conventionnelle ou usage contraires, l’employeur n’a aucune obligation d’accorder un pont.
Lorsque l’entreprise décide d’accorder aux salariés un jour de pont, il s’agit en principe d’une modification de l’horaire de travail, soumise aux formalités suivantes :
– consultation du CSE,
– affichage préalable du nouvel horaire,
– notification à l’inspecteur du travail de l’horaire rectifié avant sa mise en application (Circ. DRT nº 93-9 du 17 mars 1993).
(1) Cass.soc.03.06.97, nº 94-42.197.
(2) Cass.soc.13.05.86, nº 83-41.641.
(3) C.trav., art. R. 3135-3 et C. pén., art. 131-13.
(4) C.trav., art. L.3164-6, R. 3165-4 et C. pén., art. 131-13.
(5) Cass.soc.24.06.98, nº 96-44.234.
(6) Cass. soc.28.01.97, nº 92-44.976.
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